Comment aborder la santé mentale en entreprise ? Outils et bonnes pratiques
- Tania DA CUNHA FARIA
- 27 nov. 2024
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 17 févr.
Lors d’un événement réunissant des entreprises dites “engagées”, une cheffe d’entreprise a posé une question intéressante :“Est-ce que c’est notre rôle de gérer les problèmes de santé mentale dans notre entreprise ? Cela me pose un vrai cas de conscience.”
Cette interrogation résonne avec une réalité de plus en plus visible : la santé mentale est devenue une préoccupation majeure dans le monde du travail. L’anxiété, le stress, le burn-out ou encore les troubles dépressifs touchent un nombre croissant de salariés, et ce phénomène s’est intensifié avec les crises récentes – qu’elles soient sanitaires, économiques ou sociales.
Mais au-delà des constats, une question centrale demeure : quelle est la responsabilité réelle d’une entreprise face à ces enjeux ?
La santé mentale, un sujet complexe à gérer pour toutes et tous
Quelle que soit sa position dans l’entreprise – membres de la direction, manager ou salarié –, la santé mentale reste un sujet complexe à appréhender. Par méconnaissance, par peur de mal faire ou simplement parce que cela dépasse les compétences professionnelles.
Pour les dirigeant.e.s, la difficulté est souvent amplifiée par une question de frontière : jusqu’où l’entreprise peut-elle intervenir sans empiéter sur la sphère privée de ses collaborateurs ? Où se situe la limite entre le rôle de l’organisation et celui des professionnels de santé, comme la médecine du travail ou les psychologues ?
Les chiffres, pourtant, sont alarmants. En 2023, selon une étude de l’IFOP, 39 % des salariés français ont déclaré avoir ressenti un état de détresse psychologique au cours de l’année précédente, et 22 % ont envisagé un arrêt de travail pour burn-out.
Ces données montrent que la santé mentale n’est pas une problématique isolée, mais bien un enjeu systémique pour les organisations. Pourtant, il est crucial de rappeler que l’entreprise ne peut – et ne doit – pas tout prendre en charge.
Qu’entend-on par santé mentale et maladies psychiques ?
But first, de quoi parle-t-on ?
La santé mentale ne se résume pas à l’absence de troubles psychiques : elle englobe un état de bien-être dans lequel chacun peut réaliser son potentiel, faire face aux défis du quotidien, travailler de manière productive et contribuer à sa communauté (source : OMS). Elle inclut des dimensions émotionnelles, cognitives et sociales, qui, lorsqu'elles sont perturbées, peuvent conduire à des troubles psychiques.
Les maladies psychiques regroupent un large éventail de conditions, allant des troubles courants comme la dépression, l’anxiété et le burn-out, à des pathologies plus graves telles que la schizophrénie ou les troubles bipolaires. Elles incluent aussi des troubles obsessionnels compulsifs (TOC), des troubles de la personnalité, des troubles alimentaires (comme l’anorexie et la boulimie), des troubles liés au stress post-traumatique (TSPT), ou encore des dépendances à des substances.
Ces exemples montrent la diversité des enjeux autour de la santé mentale, qui ne concernent pas uniquement des crises extrêmes, mais aussi des déséquilibres plus subtils pouvant impacter la vie personnelle et professionnelle.

Créer les conditions de bienveillance et du "prendre soin"
Le rôle de l’entreprise n’est pas de “gérer” la santé mentale de ses collaborateurs, et encore moins de se substituer aux professionnels de santé. En revanche, elle a la responsabilité de créer un climat propice, où chacun se sent en sécurité pour aborder ces sujets.
Cela passe par plusieurs leviers :
Instaurer un climat de confiance : les collaborateurs doivent se sentir écoutés et soutenus, sans crainte de jugement ou de stigmatisation.
Clarifier les limites : il est essentiel de définir ce qui relève de la responsabilité de l’entreprise et ce qui appartient à la sphère personnelle ou médicale.
Former les équipes : donner les bons outils pour réagir face à une situation de détresse permet de ne pas être démuni.
Santé mentale : des outils concrets pour agir en entreprise
Face à la complexité du sujet, des solutions existent pour aider les entreprises à se structurer. Parmi elles :
Le PSSM : Premiers Secours en Santé Mentale
Inspiré des Premiers Secours physiques, le PSSM est une formation qui permet d’acquérir les réflexes essentiels pour identifier, soutenir et orienter une personne en souffrance psychique.
Cette formation, développée initialement en Australie, est aujourd’hui disponible en France via des organismes comme PSSM France. Elle s’adresse aux managers, aux responsables RH, mais aussi à tous les collaborateurs qui souhaitent devenir des relais efficaces.
Selon une étude de Deloitte, les entreprises ayant mis en place des programmes de pairs-aidants constatent une hausse de 15 % de l’engagement des salariés
Les objectifs du PSSM :
Reconnaître les signes de détresse psychologique.
Savoir engager une conversation avec une personne en difficulté.
Orienter vers des ressources adaptées, comme la médecine du travail ou des structures spécialisées.
Un exemple concret :
Une entreprise ayant formé 15 salariés au PSSM a vu une baisse notable des arrêts maladie liés au stress et une amélioration de la communication interne. La formation a permis de créer un réseau de confiance où les collaborateurs savent à qui s’adresser en cas de problème.
Les pairs-aidants et les bienveilleurs
Ces concepts, complémentaires au PSSM, reposent sur l’identification de référents au sein de l’entreprise. Ces personnes sont formées pour :
Écouter sans juger.
Agir comme des relais entre les salariés et les ressources disponibles.
Encourager une dynamique d’entraide et de bienveillance.
Selon une étude de Deloitte, les entreprises ayant mis en place des programmes de pairs-aidants constatent une hausse de 15 % de l’engagement des salariés et une amélioration significative de leur bien-être perçu.
Exemple :
Dans une PME industrielle, un salarié formé comme pair-aidant a joué un rôle décisif en détectant une situation de harcèlement moral qui aurait pu dégénérer. Grâce à son intervention, le problème a été résolu rapidement, évitant des conséquences graves.
Aller plus loin : construire une culture d'entreprise
Ces initiatives, bien que nécessaires, ne suffisent pas à elles seules. Pour que les actions soient pérennes, il faut engager une transformation plus large : celle de la culture d’entreprise.
Si l’enjeu pour une entreprise est de sensibiliser à la santé mentale (ou à la bienveillance de façon plus large), une option peut être d’organiser une rencontre avec l’équipe de production du documentaire Soyons fous
Une culture d’ouverture et de dialogue
Créer un environnement où la santé mentale est un sujet normalisé demande :
Une sensibilisation continue à tous les niveaux.
Une politique de management basée sur l’écoute active et la prévention.
Des actions concrètes pour réduire les facteurs de stress au travail, comme une charge excessive ou un manque de reconnaissance.
Un investissement sur le long terme
Changer ou créer une culture ne se fait pas en quelques mois. Cela demande du temps, mais aussi une vision claire et des efforts constants. C’est ici que les rencontres comme celles de Vaste Programme trouvent leur place. En ouvrant des espaces de réflexion autour de sujets de culture générale, elles contribuent à nourrir un état d’esprit curieux, critique et ouvert – des qualités qui renforcent indirectement un climat sain et respectueux.
Exemple :
Si l’enjeu pour une entreprise est de sensibiliser à la santé mentale (ou à la bienveillance de façon plus large), une option peut être d’organiser une rencontre avec l’équipe de production du documentaire Soyons fous (sortie prévue en 2025). Ce film raconte la réalisation d’un court-métrage conçu par une équipe composée à 80 % de personnes atteintes de troubles psychiques. En prenant la création cinématographique comme point de départ, il devient possible d’aborder la santé mentale de manière indirecte mais percutante, en suscitant à la fois curiosité et réflexion.
Ne pas gérer la santé mentale en entreprise coûte de l'argent
Investir dans la santé mentale, ce n’est pas seulement une question de bienveillance : c’est aussi une démarche rentable. Une étude de l’OMS montre qu’un euro investi dans la prévention des troubles mentaux rapporte quatre euros en productivité grâce à la réduction de l’absentéisme et à l’amélioration de l’engagement.
En instaurant une culture favorable, les entreprises peuvent :
Attirer et fidéliser les talents.
Réduire les coûts liés aux arrêts maladie et aux burn-outs.
Améliorer la cohésion et la satisfaction des équipes.

Changer de regard pour agir durablement
La santé mentale en entreprise ne doit pas être un “cas de conscience”, mais un axe d’action concret et structuré. Ce n’est pas à l’entreprise de gérer les problèmes, mais de poser un cadre clair et bienveillant.
En combinant des outils comme le PSSM, des dispositifs de pairs-aidants et une transformation culturelle en profondeur, les entreprises peuvent relever ce défi. Non seulement pour le bien de leurs collaborateurs, mais aussi pour renforcer leur propre résilience dans un monde en constante évolution.